Après avoir joyeusement collaboré avec son ami de toujours Fabrice Eboué sur Case Départ et Les Crocodiles du Botswanga, l’humoriste et comédien Thomas Ngijol s’essaie cette fois en solo à la réalisation avec Fastlife. Une comédie si ce n’est autobiographique, tout du moins marquée par une certaine idée du show business.
Franklin Ebagé est un athlète d’origine camerounaise. Spécialiste du sprint, sa jeune carrière prend un tournant inattendu lorsqu’il termine deuxième des Jeux Olympiques. Entre gloire soudaine et mégalomanie sans limite, il s’attelle à vivre la « Fastlife », ce mode de vie promu par les réseaux sociaux d’une génération qui veut tout, tout de suite, et mieux que les autres. Seul souci : à profiter un peu trop de la vie et de ses soudaines facilités, sa santé sportive vrille jusqu’à atteindre un état proche du néant. Franklin a aujourd’hui 30 ans, mais en a toujours douze de moins dans sa tête.
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Le miroir déformant de la célébrité
La situation de son héros looser va devenir tout au long du film un prétexte en or pour Thomas Ngijol afin de tirer à boulets rouge sur sa vision de la célébrité, des portes faciles mais aussi des dérives que celle-ci implique. Dans un monde où tout est filmé, photographié, transféré, partagé, commenté, chaque erreur est multipliée par cent. Manque de chance, des erreurs, Franklin en accumule à la pelle. Entre situations embarrassantes, auto-dénigrement et parfois vrais regards condescendants contre cette semi-star sur une pente dangereusement savonneuse, Thomas Ngijol prend plaisir à multiplier des scènes d’humour à la fois potaches et embarrassantes.
Toutes les thématiques et les facettes de la « Fastlife » sont bonnes pour multiplier un malaise que Franklin a la mauvaise idée de porter avec lui comme des chaussures de courses beaucoup trop lourdes pour bondir comme il le souhaiterait – et comme il le devrait. Franklin n’est pas un mauvais sportif. C’est simplement un mauvais être humain, du moins socialement. Ne supportant pas la critique et la remise en question, il s’enfonce peu à peu dans les méandres de l’humiliation et de la stupidité, là où ses sautes de lucidité ne lui permettent jamais d’outrepasser son manque criant de maturité et de responsabilité.
L’idiot attachant, un exercice parfaitement maîtrisé
Pour un premier travail de réalisation, Fastlife est étonnamment sérieux et appliqué. Si aucune fantaisie ou prise de risque n’est à remarquer au niveau de la mise en scène (un argument non pénalisant puisque le genre n’en demandait pas tant), le scénario est soigné autant que le screenplay. Les acteurs ne sont en aucun cas desservis par de mauvais dialogues, une petite spécialité fâcheuse des comédies françaises ces derniers temps. Du coup, le rire est moins provoqué par de lourdes situations que par l’efficacité des réparties et des réactions aux situations de l’histoire.
Surtout, c’est l’empathie presque immédiate pour le personnage imaginé par l’ancien pensionnaire du Jamel Comedy Club qui frappe immédiatement les esprits à l’évocation de Fastlife. Si l’archétype du salaud ou de l’idiot au bon fond est un exercice éprouvé (et efficace) des films anglo-saxons, les comédies françaises réussies du même genre ne font pas légion. Aidé par quelques retournements de situation qui aident à fausser l’image absolument désastreuse de Franklin, le spectateur ne peut s’empêcher de refréner une douce sympathie pour le personnage.
Il est toutefois légèrement dommageable que les personnages secondaires qui gravitent autour de Franklin, tantôt anges gardiens, tantôt démons, tantôt reflets, soient beaucoup moins travaillés que leur interlocuteur. Tous servent l’ego démesuré du coureur déchu. Mais ce faisant, ils restent cantonnés à une image préfabriquée, à l’instar de Kaaris jouant son propre rôle avec une semi-morale un peu mièvre, dans le genre « Même les rappeurs sont des êtres humains ». Merci de l’info.
Du danger de voir un peu trop grand
On comprend aisément la volonté de Thomas Ngijol de vouloir mettre à terre certains clichés, stéréotypes et autres idées reçues de cette « Fastlife » qui ronge l’humanité de ses adeptes de l’intérieur, n’en laissant qu’un noyau dur, puant l’ego et l’hypocrisie. Pourtant, à force de croiser les lieux et les situations, de la musique au sport, de Paris au Cameroun, Ngijol perd un peu la maîtrise de son film. Le fil rouge devient un peu trop flou. Le film en oublie ses repères et multiplie les taquets sans jamais asséner le coup fatal.
Rédemption par le sport ? Maturité familiale ? Critique de l’hypermédiatisation ? Retour aux sources ? Tous ces thèmes sont abordés sans jamais qu’un de ceux-ci ne sortent du lot. Franklin, en tant que grand mégalomane, impacte tout son film, dont le fouillis cérébral devient le fouillis filmique. Un énorme risque pris de fait par Ngijol, dont l’idée générale du film et la bande-annonce peuvent laisser entendre que Fastlife se contente d’être une comédie lourde et pédante, quand elle varie au contraire ses genres, sans jamais toutefois les approfondir.
A force de vouloir explorer toutes les facettes de son personnage, et à travers lui, toutes les facettes des genres majeurs du cinéma, Fastlife perd en force. Ngijol a choisi d’être convenable en tout, plutôt que d’exceller dans un domaine précis. Son personnage finira de la même manière. Un risque que l’on regrette. Assurément, Fastlife reste un film plaisant, dont le défaut majeur est de s’être bridé par peur du ridicule. Ridicule, le film ne l’est pas, à l’inverse de son protagoniste. Toutefois, les deux doivent prendre de l’assurance quant à leurs qualités.
Fastlife sera en avant-première le mardi 15 juillet à 19h15 au Gaumont Capucines (Paris) : vous pouvez réserver vos places dès maintenant.
Hypesoul vous fait également gagner une place pour deux personnes pour aller voir le film. Participez et tentez votre chance !
Robin Souriau
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En avant-première, critique de Fastlife, le dernier film de Ngijol, par le merveilleux @RobinSouriau. Must-read. http://t.co/EKvEoPXWs2
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