Lorsque les lumières de la ville s’éteignent, que les volets se ferment et que les clubs ouvrent apparaît un sentiment d’évasion, une envie de prendre son véhicule pour rider tout en écoutant une musique parfaite pour l’instant. Le rap prend en ce moment des allures trop dancehall par l’explosion du mainstream et l’underground français en assume les conséquences.
Pourtant, une grosse poignée de morceaux s’inscrivant dans une vibe nocturne sont sortis ces dernières années. On peut citer des artistes comme Espiiem, Bitsu ou encore Luxe, qui ont contribué à faire de cette ambiance une vertu de l’underground. Dans cette mini-liste, on décrypte pour vous 5 morceaux récents à consommer pour rider de nuit.
#1. Cityzen Spleen – Tengo John (feat. Prince Waly)
S’inspirant d’un sample du pianiste Bill Evans, le producteur LaSmoul à pondu un beat d’un minimalisme renversant et mélancolique. Les légères notes de piano qui composent « Cityzen Spleen » ont un sens, une identité. Elles laissent un présage de vide. Dans ce morceau tiré de la mixtape Multicolore, les deux artistes s’expriment dans une dépression singulière. Tengo aborde une certaine déception et évoque même le suicide.
Prince Waly aborde quant à lui, une description métaphorique des problèmes liés aux quartiers sensibles. Les thèmes de la mort et de l’ennuie sont pris de court par les basses puissantes et des rythmes de piano lents. Donnant alors au morceau un croisement entre la mélancolie et le pétage de plomb. La ville sinueuse et vide qui se dessine à travers la chanson est le meilleur endroit pour écouter ce morceau, unique dans son genre. Simple, mélancolique.
#2. Trafic – F430
Les adeptes de Cloud rap ont pris la mauvaise habitude de négliger bon nombre d’artistes. Le duo F430 en fait partie. Le groupe s’est pourtant créé un univers nocturne qui a rassemblé un public fidèle. Leur album Thank You God est une pépite regorgeant d’autotune et de productions planantes. Parmi les titres du projet apparaît le morceau “Trafic”, l’un des plus maîtrisés de l’album. Le thème du son repose sur un sujet familier au Rap à savoir la vente de drogue et le crime organisé.
Le morceau est marqué par une mélodie de piano rapide agrémentée par une reverb très particulière, accentuant l’ambiance mélancolique et criminelle de la nuit. Les deux rappeurs décrivent leur train de vie partagé entre la survie et la vente de drogue. “Trafic” plonge le consommateur de musique dans un univers où le crime et l’argent font la loi, la nuit en est le décor propre.
#3. Pas pareil – L’Ordre du Périph
L’Ordre du Périph, collectif composé de Youv Dee, Assy, Ars’n et Swan a sortie en 2017 une mixtape de qualité nommé Vogue Merry. Outre des sonorités très “turn up” déjà présentes sur leurs anciens morceaux, le groupe avait surpris en s’intégrant dans un registre plus détendu aux influences cloud. Le morceau “Pas pareil” en était le fer de lance. Interprété par Youv Dee et Assy, le titre doué d’une mélodie lente et apaisante, fait voyager directement l’auditeur dans un le Paris de la nuit. On s’identifie rapidement au son grâce à son esprit d’amitié et de solidarité. “Pas pareil” justifie en effet la différence de l’ordre face à leurs adversaires. Mention spéciale au couplet d’Assy qui voue dans ses paroles un amour sincère à sa clique. Un morceau à conseiller entre amis pour rider lors d’une soirée d’hiver.
#4. Medellin – Triplego
Dur est la façon de qualifier la musique du duo Triplego. Entre des sonorités cloud, des instruments traditionnels du Maghreb et des percussions venant tout droit d’ailleurs, le groupe s’est pris d’un véritable engouement pour la différence. Précurseur dans un domaine aujourd’hui dominé par PNL, Sanguee et Momo Spazz disposent d’une discographie de qualité avec 6 projets depuis 2016.
Parmis ces derniers, l’EP #enAttendantMachakil comporte un son à part nommé “Medellin”. La production signée Isma, s’illustre par des basses imposantes rythmées par une note de guitare orientale. La mélodie a l’image de la première phase « Monte et redescends » change de tempo à de nombreuses reprises. Rendant alors l’auditeur ivre des paroles lentes de Sanguee. L’artiste et ses adlibs de rage, donne au titre une ambiance unique. Une mélancolie mélangée à un léger sentiment de haine. Probablement l’un des meilleurs morceaux du duo, accompagné par un clip minimaliste haut en couleur.
#5. Lolita – Les Alchimistes
Créé par le producteur Noxious, “Lolita” est un morceau au sens caché. Passé un peu inaperçu dans le dernier projet du duo belge dit OSEF. A première vue, le son a des allures d’épopée amoureuse classique. Une mélodie de piano inversée allié à un violon strident. Des couplets simples mais pleins d’émotions de Ruskov et Rizno. Ainsi qu’un refrain entêtant ou le regret semble prendre le dessus sur la voix des artistes. C’est alors qu’une phase révèle l’identité du morceau, la fameuse “Nos amours diluviennes”. Cette phrase tient d’un roman de Vladimir Nabokov, un écrivain à succès des années 70, le livre se nomme évidemment Lolita.
Cette oeuvre au caractère plus que scandaleux traite d’une histoire d’amour entre Humbert, homme adulte et Lolita, jeune lycéenne. Ainsi, faire le lien entre le morceau et le livre s’avère facile. “Lolita” des Alchimistes est une véritable interprétation du roman. Dès la première phrase du morceau, Rizmo fait référence à Humbert observant Lolita dans un parc entourée de ses amis. La fin du couplet de Ruskov prend elle aussi l’accent du livre avec les cris de l’artiste “ Oh lolita, je te sortirais de là” référence directe à la tyrannie de Humbert. La fin du refrain est peut-être la plus malfaisante avec “Tes beaux yeux plissées, la plus belle des collégiennes”, plongeant l’auditeur dans un malaise profond. Écouter ce morceau doit se faire avec précaution et du recul pour rider. “Lolita” est un titre nocturne interprété tel un “Julien” de Damso, complexe, fascinant et dérangeant.
Si certains de ces morceaux peuvent paraître particuliers, il ne fait aucun doute qu’ils sont excellents pour rider la nuit ! Que ce soit par l’ordre du périph, Prince Waly, Triplego ou encore les alchimistes. Le rap français démontre qu’il est encore utile à vos sorties nocturnes.